Fini la broderie, maintenant c’est tapestry!

1–5 joueurs, 12 ans et +, 90 à 120 minutes
Auteur: Jamey Stegmaier
Illustrateur: Andrew Bosley, Rom Brown
Editeur: Stonemaier Games
89,90€ en VF chez Philibert

Que de buzz et de mouvement autour de ce jeu !

Un jeu de civilisation, sorti tout droit de chez Stonemaier Games avec du beau matériel ? Il n’en fallait pas plus pour me faire lâcher mon canevas reproduisant La dame à la Licorne et assouvir ma curiosité en jouant à Tapestry.

C’est chose faite, et comment dire : si ma première partie a été en demi-teinte, surprise par le format de ce jeu de civilisation ; il n’en reste pas moins que j’ai eu envie d’y retourner. Et grand bien m’en a pris. J’aurai pu passer à côté en me laissant emporter par cette première impression alors que la suite en vaut largement la peine. Explications :

Tapestry n’est pas un « vrai » jeu de civilisation, pas un pur, mais un jeu axé sur le développement de civilisations tout de même.

On est dans la gestion de ressources, l’optimisation et la maximisation de nos actions en combottant différents effets de cartes ou peuples… 5 phases de revenus , et seule la première se déroule en même temps pour tous les joueurs ; puis on fait une action d’évolution chacun son tour sur les pistes de développement en en payant le coût… On a le choix d’évoluer sur 4 pistes différentes mais ingénieusement imbriquées entre elles : technologie (des améliorations dans le temps et des bonus), militaire (conquête sur la carte centrale), exploration (révéler de nouvelles tuiles territoires) ou piste scientifique (obtenir des cartes fresques et évoluer gratuitement sur les pistes grâce au lancer de dé) …

Et cela décontenance, en effet, et ne correspond pas aux harangues de la boite : « grande fresque des civilisations »…. Bof. La thématique est présente mais n’est pas optimisée : par exemple le nom des évolutions sur les pistes de développement reste anecdotique et le fait d’avoir des cartes technologies reprenant des inventions réelles dans un ordre anarchique et anachronique est plutôt perturbant. Heureusement, aucune référence à des civilisations ou à l’histoire réelle. (mais qu’est ce que l’histoire réelle ? N’est-elle pas réinventée et réinterprétée selon le prisme des historiens ancrés dans leur temps ? Vous avez 4 heures…)

Cette première partie m’a également déconcertée par le peu de nombre de cartes fresques jouées. Avec un tel nom de jeu, je m’attendais, à la fin de ma civilisation, à terminer une fresque digne de la tapisserie de Bayeux (enfin presque, pas 70 m ok, c’était du pur bling-bling déjà à l’époque mais quand même…). Je me retrouve en fait avec un tryptique de 3 cartes posées (un peu plus parfois avec certains pouvoirs qui permettent de recouvrir une carte déjà posée) qui n’a pas flatté mon égo civilisationnesque… Et là aussi, pas de grande cohérence, on peut poser le magnat du pétrole juste après la maîtrise du feu… Ou poser une carte monarchie, puis dictature, puis régime présidentiel de la Vème république (ah non elle existe pas celle-là, mais ce serait logique niveau enchaînement).

Bref, une partie agréable à jouer, que j’ai heureusement gagné. (je ne rejoue pas aux jeux auxquels je perds… Un grand principe de mauvais joueur assumé !……Nan, je plaisante, ça c’est le profil d’un autre membre de la Team Geeklette dont je ne peux absolument pas dévoiler le nom pour des raisons évidentes de sécurité.) [GeekLette: c’est pas moi… hihi]

Une première impression mi figue-mi-raisin de la colère… Dubitative mais persévérante, je rempile pour plusieurs autres parties

Et là, touchée par la grâce (ça m’arrive plusieurs fois par jour), j’ai enfin la révélation ludique. Les parties s’enchaînent, simples et intéressantes, tendues et motivantes…

Après une première partie axée sur la technologie, je découvre les joies du militaire et de l’exploration (passage dans l’espace très décevant niveau bonus)… La partie suivante, je diversifie au maximum mes pistes pour profiter des bonus de base peu gourmands en ressources et m’adapte aux stratégies adverses en switchant complètement mon côté science pour partir de façon opportuniste et conquérante sur la piste militaire… Au final, et jusqu’à présent aucune partie n’a ressemblé à la précédente et les combos d’actions sur les pistes sont juste excellentes. L’adaptation à sa civilisation de départ est indispensable mais les différentes façons de scorer ne sont jamais fermées (sauf pour le militaire si la voie développement sur le plateau ne trouve pas de candidat/adverdaire).

Certes, le jeu a peu d’interaction franchement frontales car les combats sont réduits au minimum sur la carte. Mais adapter constamment sa tactique au déroulement de la partie, et avancer sur les pistes en visant les bâtiments et bonus de fin de partie avant les autres est indispensable pour la victoire. Impossible de jouer seul dans son coin.

Le matériel est vraiment beau, même si les bâtiments n’apportent pas un grand plus sur la capitale, voire rendent moins lisible les bonus acquis. Les plaques personnelles et celles des capitales sont très légères mais granuleuses ce qui permet aux jetons et bâtiments de production de tenir très facilement. Au passage, peu d’intérêt pour les points apportés par ladite capitale.

Pour les nombreuses cartes fresques, j’aurai préféré une certaine évolution entre elles, par exemple en créant différents âges ou périodes dans lesquelles on pourrait piocher au fur et à mesure de l’avancée de la partie car certaines cartes sont vraiment violentes et d’autres inutiles (pour la partie en cours, elle peuvent la partie d’après être indispensables). Il vaut mieux en avoir plusieurs en réserve pour avoir le choix le moment venu.

J’apprécie franchement la simplicité des règles, les visuels, les mémos des actions et cartes sont très clairs. Les tours s’enchaînent facilement tout comme les phases de revenus. Et au final, on réfléchit et on s’amuse autour de la table et c’est le principal ! Objectif atteint !!

Peu coutumière du fait (toute 1ere fois ,toutoute première fois), j’ai également testé le mode solo. Je me suis finalement prise au jeu, une fois les règles et la mise en place assimilées (certaines histoires de priorité d’évolution sur les pistes de l’automa sont parfois obscures, mais il faut du bon sens garder et ça passe). Le fait de tirer 2 cartes pour effectuer les actions de l’automa est également peu intuitif mais après quelques tours, cela devient un automatisme. De même, la priorité de pose des tuiles terrains est un coup à prendre. Dans ce mode, on se bat uniquement contre l’automa : il marque des PV , évolue sur les pistes comme un adversaire classique mais également sur la carte pour l’exploration et la conquête. L’empire de l’ombre évolue de son côté , ne marque pas de PV et se positionne uniquement sur les pistes pour la course aux monuments et l’objectif compléter une piste de développement. Le fait d’avoir différents niveaux de difficulté (de 1 à 6) est appréciable et propose une forte marge de progression (ouch les niveaux finaux, je crois que le niveau 6 « automa le briseur de rêves » porte bien son nom!)

Nous avons également eu l’occasion de tester une partie à 2 avec l’empire de l’ombre en spécial guest. Mon adversaire et moi-même n’avons pas franchement été convaincus par l’utilité de cette variante, l’empire de l’ombre évolue sur les pistes et gagne des bâtiments… il peut également remplir l’objectif « compléter une piste de développement» mais à part ça…. Rien de bouleversifiant. S’il a gagné quelques bâtiments aux final, sa participation est restée anecdotique …

Alors oui, le jeu surprend par rapport aux attentes du joueur, le coup du correctif des civilisations c’est moyen-bof , mais on ne peut pas reprocher à Jamey Stegmeier de proposer une expérience de jeu innovante qui fait son petit effet. L’asymétrie avec les civilisations est présente, certes, mais pas insurmontable et la rejouabilité est énorme.

Rq : Le correctif pour les civilisations jugées trop déséquilibrées a été diffusé : https://stonemaiergames.com/games/tapestry/ (pfff, me sens un peu joueur-bêta -testeur sur ce coup)

Le jeu est facile à sortir même avec des joueurs non hardcore (pas 1 heure de règles avant de se lancer) , la linéarité de l’évolution sur les pistes cache en fait des choix multiples et une adaptation permanente : on ne s’ennuie jamais autour de la table.

Ce n’est pas un jeu parfait , mais il est tellement plaisant à jouer qu’ il a acquis toute sa place dans notre ludothèque et y restera un long moment.

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