Jeux de société à deux

Article écrit par Patrice

Six grands « petits jeux » aux règles simples mais pas simplistes pour des parties de moins de 30 minutes avec des mécaniques très différentes les unes des autres…. Que j’adore !

Après les bilans de l’année écoulée, le monde ludique a vite tourné les yeux vers le Festival de Cannes (FIJ) et la longue liste des jeux qui y étaient présentés. Les plus prévoyants, du moins les plus « acharnés », avaient au préalable écumé les divers sites et blogs ludiques à la recherche d’informations sur les nouveautés ou prototypes à ne pas rater afin d’optimiser au mieux les courts 3 jours que durent ce festival. Et maintenant les articles vont fleurir pour raconter et détailler tout ce qu’il s’est passé durant ces trois jours.

Je crois que je ne vais pas les lire, parce que je boude un peu de ne pas avoir pu m’y rendre cette année… mais en vrai je suis trop curieux….

Alors j’ai eu envie de vous parler des jeux auxquels je joue actuellement, des jeux qui ne figurent pas dans la « hype » du FIJ, plutôt des jeux à peu de joueurs puisque tout le monde était à Cannes. Oui, oui, je radote mais j’avais tellement envie d’y aller… snif. Mais j’adore les jeux en tête à tête, alors quoi de neuf ?

Santorini tout d’abord :

Malgré une couverture magnifique et trompeuse, mais si belle, Santorini est un pur jeu de stratégie abstraite. Il se joue principalement à 2 joueurs mais il est possible d’y jouer à 3 (c’est assez rare dans ce type de jeux pour le noter) et dans ce cas il faudra savoir s’allier pour trahir à temps pour vaincre. La version à 4 joueurs n’est qu’une version de duel à 2vs2.

J’ai rarement vu une règle aussi simple liée à un jeu profond et si complexe à gagner au final. Le jeu se déroule sur un plateau de 5×5. Après avoir placé chacun ses deux personnages, chaque joueur joue à son tour et la règle tient en deux points :

  1. Il déplace l’un de ses personnages sur une des 8 cases adjacentes à la sienne. Celle-ci doit être inoccupée et le personnage ne doit pas devoir monter de plus de 1 niveau.
  2. Il construit un étage d’immeuble sur l’une des 8 cases adjacentes à sa nouvelle position. La case doit être inoccupée et la pose du 4ème étage (dôme) « condamne » la case pour la suite de la partie.

Le premier qui parvient à déplacer un de ses personnages sur un 3ème étage emporte immédiatement la partie.

Ce jeu m’a rappelé la série du Projet GIPF par la pureté et la simplicité de ses règles. Comme ces jeux ou les grands classiques de ce type de jeux (Echecs, Go, Dames,…) il en a, en apparence, le même « défaut », à savoir que le hasard n’existe pas et qu’une hiérarchie peut rapidement se créer entre joueurs.

En apparence ai-je dit, parce que là est le second « tour de force » de ce jeu : le Panthéon : des cartes « Dieu » ou « Héros ». Quand vous jouez avez ces cartes, chacun en prends une (choix ou hasard, comme vous voulez) en début de partie et joue avec la particularité de celle-ci. Certaines donnent une « capacité » supplémentaires alors que d’autres offre une possibilité alternative de l’emporter. Les dieux ont un pouvoir pérenne alors que les Héros ont un pouvoir « one shot » à utiliser au cours de la partie. Avec ces cartes les niveaux peuvent être rebattus, la rejouabilité est énorme et impossible de « s’entraîner » à toutes les configurations de duels. Ainsi un novice sera un peu moins désavantagé. Les auteurs ont pris soin de préciser que certains dieux sont incompatibles entre eux. Il y aura certainement des Dieux « plus forts » que d’autres ou que l’on « préfère », c’est aussi l’opportunité de jouer avec un système de handicap. « Course » aux Strech goals oblige pour attirer le chaland (oui le jeu a pu être réédité via une version KS mais est maintenant disponible dans les bonnes crèmeries) de nombreuses cartes existent et la rejouabilité du jeu sans jamais jouer la même partie est exponentielle.

Enfin : ce jeu est magnifiiiique ! Je suis en admiration devant les éléments du jeu. Contrairement à sa version initiale de 2004, auto-édition modeste qui restait dans la tradition des jeux abstraits en noir et blanc et au design très épuré même si parfois joli, cette nouvelle version opte pour des pièces de bâtiments (une forme par niveau étage + les dômes du 4ème) dignes d’un projet d’architecte. A voir aussi le jeu « customisé » avec des leds. Le plateau de jeu n’est pas épargné par le travail esthétique. Pas de mots, juste des photos pour vous expliquer :

Le travail des illustrateurs Lina Cossette et David Foret (tient, tient, l’équipe Cuddington… mais ils opèrent aussi sur Charterstone, le projet « jeu Legacy » en cours de Jamey Stegmaier, ça promet) s’exprime aussi avec merveille sur les cartes du Panthéon. Clairement, y’a pas à dire, c’est un vrai plus de jouer avec de beaux jeux !

SIXTH

Sixth! (ou Six Making) est le second jeu dont je voulais vous parler aujourd’hui. Il illustre parfaitement ce que je vous disais sur le côté austère des jeux de stratégie abstraite (bon là d’accord c’est argent et marron plutôt que noir et blanc mais bon…). Même si parfois la mécanique des jeux donne des contraintes pour leur réalisation, Il fallait vraiment que j’aime ce jeu pour l’acquérir. Austère et affublé d’une boîte #plusmochequeçatescensuré (particulièrement dans sa VF, le même éditeur ayant fait des choix plus heureux pour l’édition anglophone par exemple) le jeu vaut vraiment de dépasser cette apparence pour le découvrir.

Sixth! partage avec le précédent le fait de se dérouler sur un plateau de 5×5. Dans cet espace restreint, il revisite avec succès les échecs. Il n’est pas le premier à tenter cet exercice difficile et peu l’on fait avec succès. Là où Tempête sur l’échiquier avait amené le chaos et l’anarchie sur le plateau avec l’aléa des cartes piochées, Sixth! a choisi de rester dans la ligne « pure » des jeux symétriques à informations complètes. Il a juste réduit la taille du plateau et n’utilise que des pions dont la possibilité de déplacement sera variable selon la taille de l’empilement. Là encore la règle est plus que simple, même si il faut au préalable connaître les mouvements des diverses pièces d’échec.

La partie commence sur un plateau vide. A son tour,  le joueur à deux possibilités d’action :

  • il introduit un nouveau pion sur le plateau de jeu en le posant sur une case inoccupée
  • OU il déplace tout ou partie d’une colonne (de 1 ou plusieurs pions) sur une case déjà occupée en respectant la règle de déplacement liée à la hauteur de la pile de laquelle il part. En effet, selon sa hauteur, une pile « équivaut » à une pièce d’échec et défini donc le déplacement autorisé :

Le joueur qui parvient à construire une pile de 6 pions ou plus avec un pion de sa couleur au sommet emporte immédiatement la partie.

C’est simple, clair, pur… et complexe !

Game of thrones – Hand of the King

A Game of Thrones – Hand of the King est d’un tout autre registre que les deux précédents. Il s’agit d’un « petit jeu léger et taquin », comme l’a récemment rappelé son auteur, qui sortira en VF au printemps. Toutefois la VA (je dis Version Anglaise parce que VO pour un jeu en anglais d’un auteur français…. c’est pas logique) est déjà disponible et je m’y suis précipité après que Micha m’ait fait découvrir ce jeu. Parce que le jeu (bien sûr), les illustrations, le thème,…. l’humain craque… et joue, joue !

Nous voici donc au cœur de Westeros et vous caressez l’espoir d’obtenir le poste très convoité de « Main du Roi ». Pour y parvenir, et remporter la partie, vous allez faire appel aux services de Varys, l’infâme maître espion afin d’obtenir les faveurs de la majorité des familles présentes à  l’assemblée réunie par le Roi. Les sept familles de Westeros sont réunies, représentées en nombre variable (de 2 à 8).  Pour mettre en place la partie, vous allez constituer aléatoirement une grille de 6×6 cartes représentant chacune l’un des membres des sept familles (35 personnages) + Varys.

Ensuite le tour de jeu est simple :

Varys va donc se trouver en plein cœur de l’assemblée et pouvoir « déambuler » d’un personnage à l’autre pour les « convaincre » de se rallier à la cause de celui qui le déplace.

 

À votre tour de jeu vous devez « envoyer » (déplacer) Varys de sa nouvelle place vers un personnage que vous allez recruter le long d’une ligne ou d’une colonne. Vous recrutez ce personnage et vous placer Varys dans la grille à sa place Si dans son déplacement Varys croise un (des) membre(s) de la même famille que le personnage ciblé, vous les recrutez également. Avant de finir votre tour vous vérifiez si avec les personnages recrutés vous possédez autant ou plus de personnages de cette famille que quiconque. Si oui, vous prenez possession de la bannière de la famille. La partie prend fin lorsque Varys ne peut plus être déplacé. Le joueur possédant le plus de bannières l’emporte. En cas d’égalité, la victoire sera pour celui qui possède la bannière de la famille la plus nombreuse.

C’est tout ? Non, évidemment, rien n’est si simple à Westeros, vous le savez… Alors ?

Alors : dès qu’un joueur recrute ou tue le dernier représentant d’une famille dans l’assemblée il acquiert le droit de recruter un des six compagnons présents dans la partie. Ces compagnons possèdent un pouvoir susceptible de créer de beaux retournements de situation (meurtre, recrutement chez l’adversaire,…). Il en existe 14 et six sont tirés au sort pour une partie. Selon les compagnons qui apparaissent, il faudra savoir adapter sa stratégie de jeu car il est impossible de les négliger tellement leur pouvoir peut être grand, mais pas toujours, ou pas à tout moment de la partie. Et puis quel pied quand même, avouez-le, de pouvoir décider soi-même de « tuer » l’un des personnages de cette série grâce à un compagnon !

Le hasard de la mise en place et des compagnons tirés au sort pour la partie offre une grande variété d’ouvertures et de stratégies. C’est bon, c’est méchant parce que la thématique colle parfaitement au jeu (même aux compagnons qui peuvent se révéler si puissants). Le jeu est magnifiquement servi par les illustrations de Mihaljo Dimitrievski dont j’ai déjà apprécié le travail sur Pillards de la Mer du Nord (GGA 2016 dont les extensions sont actuellement proposées en campagne KS). On pourra reprocher un risque de kingmaking dans la version à 3 de ce jeu. Je l’ai vécue : situation avant le dernier coup : deux joueurs (dont moi) ont trois bannières, le troisième n’en a qu’une mais il doit jouer le dernier coup de la partie et peut encore choisir entre 2 personnages de familles différentes qui lui donneront l’un comme l’autre la majorité dans une famille et reprendre ainsi une bannière à l’un ou l’autre de ses adversaires… mais lequel ? Résultat final 3 /2 / 2. Reprocher du kingmaking à Game of Thrones, ce serait reprocher à un chat d’être un chat ? Non ? On a négocié, juré, râlé, « menacé », rigolé et on a rejoué pour se départager… On a passé un bon moment en fait. Je n’ai pas essayé la version à 4 joueurs (2vs2 sans communiquer, sauf avec la corneille).

 

Schotten Totten

Schotten Totten n’est évidemment pas une nouveauté loin de là, mais il est une petite « Madeleine de Proust » que j’emmène toujours avec moi. Facile à expliquer, se joue presque partout et puis j’y joue très souvent avec Fanny, en attendant les autres ou pour finir une soirée, mais maintenant elle s’arrête de jouer dès qu’elle a remporté une manche de plus que moi… , pfff… Enfin faut bien qu’elle gagne parfois… Ha ha

L’usure de ma boite était témoin de ces voyages et parties nombreuses. Il était temps que le jeu soit réédité. Il vient de ressortir dans la série des petites boites blanches chez Iello, magnifiquement illustré par Biboun. Et j’ai donc étrenné une nouvelle boite ces derniers jours… et force est de constater que les combattants ont pris du muscle :

Pour mémoire vous coordonnez les actions de belliqueux villageois écossais (54, numérotés de 1 à 9 dans 6 couleurs différentes) qui se battent pour remporter le maximum de bornes délimitant les pâturages de leurs moutons. 9 bornes alignées sont à acquérir. Vous démarrez avec 6 cartes. A votre tour, dans l’ordre :

  • vous posez une carte devant une borne (3 max par borne, vous allez voir que ça va vite contraindre vos possibilités)
  • vous pouvez revendiquer une borne si les conditions le permettent
  • vous piochez une nouvelle carte pour refaire votre main

Pour revendiquer une borne il faut que votre combinaison de 3 cartes soit supérieure à celle de votre adversaire. Le premier qui remportera 5 bornes ou 3 côte-à-côte. Voilà, c’est simple, léger, efficace, pas dépourvu de hasard et on demande toujours une revanche parce que « C’est pas possible d’être aussi malchanceux à la pioche des cartes… »

NINJATAISEN

Comme j’ai placé cet article sous le thème des petits jeux à 2 plutôt courts que j’affectionne ces temps-ci, je vais finir en évoquant 2 petits « nouveaux » déjà joués mais pas encore dans ma ludothèque parce que je les attends avec impatience :

Tout d’abord, ma ludothèque s’enrichira prochainement d’une autre petite boîte blanche Iello parce que j’ai découvert qu’ils allaient implanter en France Ninja Taisen, une petite perle japonaise ramenée d’Essen par Micha en 2014.

 

C’est encore une histoire de villages en conflit. 9 champs séparent ces deux villages. Chaque armée est composée de 1 chef + 9 Ninjas de type (pierre, feuille, ciseaux) et de force (1 à 3) différents. Elle va essayer d’aller prendre le contrôle du village adverse. Les déplacements des combattants sont gérés par 3 dés D3 de couleurs différentes (1 par type) que le joueur lance au début de son tour. Lorsque des ninjas adverses se rencontrent ils combattent « façon Chifoumi » (et vous êtes surpris si je vous dis que c’est grâce à Guillaume du même nom que j’ai appris que le jeu arrivait enfin ?). Si les combattants ont la même arme, c’est  leur force qui les départage et en cas d’égalité chacun bat en retraite. Bref c’est simple, tactique, mâtiné d’un peu de hasard pour les déplacements avec les dés et belliqueux à souhait ! J’en avais gardé un excellent souvenir.

TIKI

Enfin, il faut que je vous parle d’un petit nouveau : Tiki, un petit jeu finaliste du concours du CNJ 2014 où je l’avais découvert. Dans un univers polynésien, sur un plateau 3×3 de neuf villages aux « bénéfices » différents,  vous allez devoir remporter la victoire en posant ou déplaçant, façon awélé, vos tikis pour « influencer » un village et en tirer parti tout en orientant vers les villages maudits. Lorsque j’ai découvert ce jeu, il s’agissait d’un prototype. Les tikis avaient été réalisés en pâte Fimo par la compagne de Nicolas Sato, l’auteur. J’avais aimé ce jeu, je souhaitais à l’auteur d’être édité mais j’avais peur que la production finale ne rende pas si bien que ce magnifique prototype. Les visuels du jeu sont magnifiques, bravo à Pauline Amelin, l’illustratrice et à Oz Edition (maison d’édition qui se lance à cette occasion) d’avoir respecté l’esthétique de ce joli projet et de le porter.

 

Je ne vous en dis pas plus, Tiki est actuellement en cours de financement sur la plateforme KS, allez voir, les explications sont claires et le jeu vaut le coup. C’est un projet pour soutenir un petit éditeur qui se lance et sans Stretchs Goals à profusion. Ils le méritent pour le produit qu’ils nous proposent. J’ai hâte d’y rejouer.

La galerie complète :

 

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