Choson

L’héritage de Yi

Successeur du mémorable Koryo dans la gamme Moonster Games, catégorie jeux de cartes contenus mais costauds, Choson débarque porteur d’un héritage conséquent.
Si Koryo avait su ériger avec brio un faisceau de qualités ludiques convergentes, (des parties courtes, une forte rejouabilité, un certain contrôle, une profondeur conséquente, des mécaniques huilées) Choson se devait d’apporter une expérience différente pour soutenir la comparaison au moins, la transcender au mieux.

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La dynastie Choson

Gary Kim a réussi à ancrer Choson, gameplay et design, dans un contexte historique coréen bien éloigné pour nous autres européens. Certes son jeu n’est pas un jeu de civilisation où l’immersion est hyper-importante, mais pour les esthètes, l’effort est appréciable. Courant de 1392 à 1910, la dynastie a été le témoin d’une véritable renaissance, à des niveaux variés : culturel, adinistratif religieux…Ainsi, pour citer un exemple, les premières horloges hydrauliques, les presses à imprimer ont vu le jour dans les premières heures de cette dynastie. Quand on voit les nouvelles illustrations utilisées dans Choson, on apprécie non seulement la qualité artistique (ça c’est subjectif) mais aussi le fait qu’elle s’insère et se justifie historiquement (ça c’est objectif) ! Les personnages font plus badass, les éléments évoquent les rouages, l’industrie…une vraie réussite (je pense aussi au jeton premier joueur collector en métal). Dans la vraie vie, la puissance souveraine de Choson s’appuyait sur 55 vassaux, tous présents au conseil royal. Le jeu Choson comporte donc...55 cartes. Boum.

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Si l’on ajoute que le Général Yi, (carte n°1 du jeu) premier Roi de la dynastie, a imposé de nouvelles règles, restauré le confucianisme (ça ne rigole pas cet -isme là) et relégué le bouddhisme aux confins du Royaume, on espère que thématiquement le jeu sera plus bourrin, plus affirmé, moins diplomatique. Et là encore Gary Kim renouvelle et chamboule son système, passant d’un jeu de courtisans/diplomates à un vrai affrontement de généraux de guerre. L’interaction, timide et feutrée dans Koryo, est au centre des débats dans Choson. Le tableau de chaque joueur évolue drastiquement dans la partie, les fiefs tombent ou se déplacent, tandis qu’historiquement les rois de Choson se déchirent, assassinent, complotent et se succèdent.

Yi

L’alphabet hangeul

Comment traduire en gameplay ce nouveau langage ? Gary Kim s’y attèle en explosant les actions possibles. Là ou Koryo proposait de base une action (2 si majorité des 5), Choson en permet quatre :

  • Jouer x cartes du même type
  • Jouer une carte x et une carte y
  • Jouer une carte et un évènement
  • Jouer trois cartes évènement

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Beaucoup plus de possibilités donc, sans non plus perdre le joueur. Le jeu reste sec et nerveux. Les cartes évènement constituent la nouveauté principale de l’alphabet Choson.
Car les cartes de valeur 1 à 8 ont dorénavant un symbole sous leur chiffre, et pas uniquement un symbole qui se déclenche avec la majorité.
Ces événements sont :

  • le lobby (cartes 1, 3 et 6)
    le lobby permet d’échanger 2 personnages, chez les autres ou chez soi
  • l’arme à feu (cartes 2 et 8)
    l’arme à feu permet de tuer un personnage, peu importe lequel, chez un autre joueur
  • l’épée (cartes 4, 5 et 7)
    l’épée permet de tuer un personnage chez un autre joueur, mais dans un range de -1 à + 1. Exemple : le 4 permet de tuer un 3, un 4 ou un 5

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Les événements deviennent un des piliers du gameplay, d’autant plus que certains pouvoirs de majorité permettent de les faire comboter (je combote, tu combotes, nous combotons) pour les fructifier en points de victoire. Ils génèrent une forte interaction entre les joueurs (là ou Koryo les sanctionnait de -1 difficiles à assumer), cadrent bien avec le thème, et même si ce chaos généré enlève un peu la sensation de contrôle que l’on avait avec Koryo, dans mes parties (une quinzaine) il n’a jamais été source de déséquilibre flagrant. En même temps, une partie dure 10 minutes, un mauvais tirage tour 8 ça arrive, et le jeu ne tient pas que sur ça.

tokens

Sans vous révéler tous les pouvoirs et petites curiosités des persos, sachez tout de même qu’il y a de la riposte, des modificateurs de points de victoire et que même le jeton premier joueur a son importance…
Allez juste un pouvoir sympa : la carte n°1, le Général Yi vous octroie un bouclier, que vous placez sur une famille pour la protéger. Ce bouclier agit aussi en tant que balance cosmique et vous accorde le bénéfice de la majorité en cas d’égalité. Bien. Mais si vous ne protégez pas Yi lui-même, rien n’empêche un adversaire de jouer un lobby sur lui, de récupérer Yi et son bouclier. Ou de le buter simplement. Gentiment…

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Le pays du matin frais

Gary Kim et Moonster Games réussissent avec Choson à transfigurer un jeu déjà énorme, en le dotant d’atours punks et belliqueux. Le résultat se traduit en fun autour de la table, que ce soit avec des joueurs expérimentés ou occasionnels. Choson reste accessible, et conserve la profondeur de Koryo tout en le faisant passer à une nouvelle ère. Encore plus réussi graphiquement, très bien foutu thématiquement, et d’une sobriété à toute épreuve dans le design (environ 60 cartes, une dizaine de jetons, petite boite, 15 euros), c’est un vrai jeu gamer, très rejouable, qui honore et respecte son prédécesseur (en lui mettant une petite tape du plat de l’épée sur la joue) (on baisse les yeux devant Yi).

Un tour de force quand on sait la bombe qu’était Koryo.

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